Entrevue : André Descheneaux

Entrevue :

André Descheneaux, avocat spécialisé en relations de travail et membre fondateur de l’Association de l’humour appliqué (AHA)

L'humour est le dada d’André Descheneaux. Cet avocat a même abandonné le droit pour se consacrer pleinement à son Association de l’humour appliqué. Il croit au pouvoir de l’humour et en prône l’utilisation en milieu professionnel. Depuis plus de 15 ans, il sillonne la province où il prêche la bonne parole. Selon vous, qui êtes un adepte de l’humour, quels en sont les bienfaits? Utiliser l’humour au quotidien est le meilleur remède pour se maintenir en santé. De nombreuses études scientifiques reconnaissent les bienfaits du rire sur les plans physique et psychique. Sur le plan physique, en plus de réduire l'hypertension et les tensions musculaires, l’humour renforce le système immunitaire et augmente la production d'endorphines, des hormones sécrétées par l'organisme et qui atténuent la douleur. Sur le plan physiologique, l’humour désamorce les situations tendues et atténue les conflits. Il réduit la fatigue, le stress et la déprime, en plus d'augmenter la motivation des salariés. Les organisations où l'on encourage le rire sont généralement des environnements sains et productifs qui stimulent la créativité, favorisent l’implication personnelle et où règne un bon esprit d’équipe. Il existe cependant une autre forme d’humour, le sarcasme, qui peut engendrer l’effet contraire et causer du tort? Effectivement. C’est pourquoi, au cours de mes conférences, je précise qu'au travail, l'humour doit être utilisé avec tact et discernement. Il doit être positif et respectueux. Au bureau ou en classe, les blagues sexistes, racistes, ironiques, sarcastiques, qui visent un collègue ou un camarade, n’ont pas leur place. Quand et pourquoi avez-vous créé l’Association de l’humour appliqué? L’AHA est née en 1988. Par son biais, j’ai tenté de susciter une réflexion sur la place de l’humour dans nos vies et savoir pourquoi celui-ci était si peu utilisé en milieu de travail. Les relations de travail – un domaine que je connais bien- sont une source perpétuelle d’affrontements. Or, quand on passe huit heures par jour dans un bureau avec ses collègues, il est essentiel de bien s'entendre. Avocat, j’ai défendu tant la partie patronale que syndicale et j’ai constaté que les deux camps avaient beaucoup de mal à se parler. Je me suis alors demandé si l’humour ne pourrait pas faciliter les échanges. C’est comme cela que j’ai commencé à m’intéresser à la question. Par ailleurs, il n’y a jamais eu autant de détresse psychologique au sein des entreprises. Des psychiatres américains ont même identifié une nouvelle maladie appelée le complexe de Pinocchio. Les personnes qui en sont affectées ont peur de rire! Votre travail consiste en quoi exactement? Je donne principalement des conférences sur les bienfaits de l’utilisation de l’humour en milieu de travail. Cela occupe 80% de mon temps. J’en tiens au Québec, en Ontario et au Nouveau-Brunswick. J’ai l’opportunité d’aller dispenser une conférence à des francophones à Vancouver car mes conférences sont en français. Je ne veux pas donner de conférence en anglais pour la simple et bonne raison que l’humour se traduit mal. J’organise aussi des ateliers à la demande d’entreprises, d’hôpitaux, d’écoles et d’associations. Ces ateliers portent sur quoi? Je donne des informations scientifiques sur les bénéfices de l’humour et du rire dans la vie de tous les jours et j’invite l’auditoire à y réfléchir. Votre travail et vos réflexions s’appuient donc bien sur la science? Je me base effectivement sur des études scientifiques. Je me documente beaucoup sur le sujet. Il existe quantité d’articles et d’ouvrages sur la part importante de l’humour dans le bien-être de l’homme et sur sa protection contre le stress. Je corresponds également avec des chercheurs qui planchent sur ces questions. Selon moi, il est important de connaître son sujet à fond avant de l’exposer à un auditoire. Au cours de vos conférences et ateliers, vous donnez des exemples d'entreprises qui encouragent l'utilisation de l'humour au travail. Pourriez-vous m’en citer? Southwest Airlines est une compagnie aérienne américaine pour qui l’humour est un critère de sélection. Les salariés de Southwest Airlines doivent avoir le sens de l’humour et l’utiliser dans leur vie personnelle et professionnelle. Ils évoluent ainsi dans un environnement de travail serein et cela s’en ressent sur les résultats financiers de l’entreprise. Ce transporteur a continué à réaliser des profits après les attentats terroristes du 11 septembre 2001, alors que tous les autres perdaient des milliards de dollars. La façon de faire de la compagnie a même inspiré un livre à un chercheur du Massachussetts Institute of technology (MIT) qui a comparé les méthodes de Southwest Airlines, Pan American Airways, US Airways et American Airlines. Clowns sans frontières est un autre exemple réussi d’organisation qui utilise le rire pour faire le bien. Cette association humanitaire tente par le biais de l’humour de soulager la souffrance des enfants les plus démunis. Le rire fait-il partie intégrante de l’homme? L'humour apparaît dès les premiers moments de la vie chez l’être humain. Le bébé ne rit-il pas et ne fait-il pas rire avant même de parler ou de marcher? Quel est votre comique préféré? J’apprécie beaucoup l’humour subtil du comique français Raymond Devos et celle de Charlie Chaplin dont les films, comme «Les temps modernes», sont indémodables. Mais pour moi, le plus grand comique qu’il m’ait été donné de rencontrer est un scientifique, un docteur en biologie de l’Université de Bergen, en Norvège, qui avait fait des recherches sur la simulation du système immunitaire par le sourire et le rire. J’ai suivi son cours et je l’ai trouvé à mourir de rire! www.aha.qc.ca

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