L’apprentissage virtuel, une notion encore abstraite au Canada

Branché sur les nouvelles technologies le Canada ? Sans conteste répondent les différentes études sur le sujet. Que cela soit à la maison, à l’école ou au travail, les Canadiens disposent d’une grande accessibilité aux TIC. Selon les données de l’Economist Intelligence Unit, en termes de préparation électronique, le pays se classait au 12ème rang mondial en 2008. En revanche, le Canada est à la traîne en ce qui concerne l’apprentissage virtuel.

« Fin 90, une étude prédisait qu’en 2003, 50 % de la formation liée au travail serait dispensée en ligne, retrace Marc Lachance, directeur du Conseil Canadien sur l’Apprentissage (CCA). Mais en 2005, une autre enquête démontrait que les formations virtuelles oscillaient seulement entre 15 et 20 %. » En 2009, le constat reste inchangé, voire plus inquiétant. Comparant 154 pays en matière d’utilisation des TIC, l’Union internationale des télécommunications situe le Canada au 19ème rang mondial. Le pays accuse une chute de dix places, si l’on se réfère au classement de 2002.

État des lieux

Pour autant, l’apprentissage virtuel n’est pas absent du monde de l’entreprise, « mais il concerne à 90 % les grandes organisations », observe André Goli, directeur d’Edu-Perfomance, créateur de solutions d’apprentissage virtuel. Dans son rapport de 2009 sur « l’État de l’apprentissage virtuel au Canada », le CCA dresse le même constat. Pour André Goli, ces grandes entreprises sont à 70 % consommatrices de formations sur-mesure dont les thématiques sont le management, la migration de systèmes, le comportemental ou encore le service à la clientèle. Ce sont toutefois les très grandes organisations qui utilisent la formation virtuelle de la manière la plus optimale car elles ont compris les atouts de cet outil : optimisation des coûts, uniformisation des parcours, fidélisation des salariés.

Un outil plus qu’une solution à part entière

« La plupart des entreprises n’ont pas compris les atouts et les possibilités de cet outil », regrette André Goli. Pour le directeur d’Edu-Performance, tout est une question de vision : « en Europe, l’apprentissage virtuel est bien souvent mixé à des formations en présentiel ou à du tutorat en ligne. Au Canada, il est utilisé seul la plupart du temps. Or l’apprentissage virtuel est seulement un outil pas une solution à part entière. »

Deux freins majeurs

Dans la pratique, les entreprises achètent un programme de formation en ligne qu’elles ne relayent pas en leur sein. Résultat, le cursus n’est pas utilisé et l’expérience se solde par un échec. André Goli et Marc Lachance se rejoignent sur ce point : pour être efficace, la formation virtuelle doit être encadré et suivi au sein des organisations. « Cela demande d’avoir un budget « formateur » qui prenne en compte cette notion d’encadrement et de suivi de ces cursus », appuie le directeur du CCA.

Le problème est bien là. La majorité des entreprises ont des budgets formation relativement serrés au Canada. Un budget qui permet à certaines de payer le coût d’une formation en ligne mais pas son encadrement.

Auteur du rapport de 2009 du CCA, Erin Mills identifie un deuxième frein au développement de la formation virtuelle : « les entreprises éprouvent également des difficultés à définir leurs besoins en cette matière et l’investissement que cela va leur demander. »

Chacun a un rôle à jouer

L’apprentissage virtuel est-il condamné à rester à la traîne au Canada ? Nos différents interlocuteurs ne le pensent pas. Tous sont en revanche convaincus que d’énormes progrès doivent être accomplis tant du côté des entreprises que du côté des organismes de formation. « Dans chaque province, des organismes développent des outils ou des solutions qui restent confinés dans un cercle restreint. Parallèlement des entreprises, dans le domaine de la médecine notamment, utilisent l’apprentissage virtuel de manière plus poussée, mais là encore ce n’est pas relayé », analyse Marc Lachance.

Afin de développer l’apprentissage virtuel, le CCA recommande donc la création d’un forum national, d’un lieu d’échanges et de partage, de comparaison des bonnes pratiques. Et les organismes de formation ont également un rôle à jouer. L’offre ne crée-t-elle pas la demande ? Dans ses recommandations, le Conseil Canadien sur l’Apprentissage invite en effet les fournisseurs à concevoir des solutions d’apprentissage virtuel en partenariat avec les entreprises, tant au niveau du diagnostic de leurs besoins que dans la conception de solutions adaptées.

Prendre exemple sur les universités

Le monde de l’entreprise pourrait également regarder du côté de l’univers scolaire et étudiant où de belles initiatives ont vu le jour en matière d’apprentissage virtuel. Le Centre d’études sur l’apprentissage et la performance (CEAP) de l’Université Concordia a ainsi créé le logiciel d’alphabétisation en ligne ABRACADABRA. Il se destine à tous les élèves de primaire du pays.

L’Athabasca University (AU) a elle été fondée en 1970. Reconnue internationalement, elle offre exclusivement des formations en ligne. Citons encore l’École de médecine du Nord de l’Ontario. Conçue par la Lakehead University de Thunder Bay et l’Université Laurentienne de Sudbury, l’EMNO forme les médecins de communautés rurales autochtones et francophones du Nord de l’Ontario. De quoi donner l’inspiration…

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