Dans la plupart des entreprises, l’entretien annuel est un passage obligé, et souvent redouté autant par l’employé que par son responsable. Mais résumer une année en une heure d’entretien n’est peut-être pas une méthode des plus efficaces. D’où l’idée de les remplacer par des rencontres de collaboration.
Selon une étude mondiale menée en 2013 par la société de sondages américaine Gallup, pour un salarié qui se dit « émotionnellement » engagé au sein de son entreprise, deux autres employés ne se sentent, eux, aucunement investis.
Au Canada, 69 % des employés affirment que l’engagement professionnel fait défaut dans leur organisation. Plus de 30 % sortent frustrés et démotivés de leur entretien d’évaluation annuelle – un sentiment qui les porte à regarder les opportunités d’emploi ailleurs.
Plusieurs entreprises veulent éviter que l’entretien annuel d’évaluation devienne un déclencheur de démotivation. Depuis deux ans, environ 5 % des employeurs québécois ont fait le pari des rencontres de collaboration. Leur réalisation est confiée aux trois agences développant cette approche novatrice. Parmi elles, Patrimoine RH et son fondateur Philippe Zinser constatent que l’évaluation annuelle est un outil qui, même amélioré, ne fonctionne plus : « 45 minutes pour retracer 2000 heures de travail, c’est en partant une chose impossible et frustrante. La science nous dit aujourd’hui que passé trois mois, notre cerveau perd énormément en précision ». Or, plus des trois quarts des compagnies au Québec recourent toujours, souvent faute de mieux, au système d’évaluation hérité des années 70. (Les 15 à 20 % des compagnies restantes n’utilisent aucun mécanisme d’évaluation de leurs employés.)
Evelyne Joseph, conseillère en ressources humaines pour la firme montréalaise de gestion de projets de construction Macogep, reconnaît que l’évaluation annuelle est « souvent perçue, autant par les évaluateurs que par les évalués, comme un processus contraignant, long et fastidieux. Notre firme n’a pas encore officiellement adopté les rencontres de collaboration, mais nous le faisons déjà largement de façon informelle, en fonction des besoins des employés ».
Les rencontres de collaboration demeurent individuelles, se produisent idéalement en 3 séances de 30 minutes chacune durant l’année et consistent en un tête-à-tête en dehors des structures habituelles. « Les nouvelles générations vivent dans l’instantanéité et sont hyperconnectées dans un monde professionnel de plus en plus collaboratif. Elles ont besoin de retours plus rapides et fréquents, de pouvoir s’améliorer sans devoir attendre un an », précise Philippe Zinser. Les rencontres se déroulent à l’extérieur ou dans un espace du lieu de travail où l’employé est à l’aise, non dans un bureau où il se sent convoqué et jugé par sa hiérarchie.
Les formulaires d’évaluation et les cases à remplir sont remplacés par des questions ouvertes. Le dialogue s’ouvre en s’intéressant d’abord à l’employé et non à la réalisation des tâches listées dans son descriptif d’embauche. Il est alors davantage question d’avenir, de créativité, d’enjeux améliorant l’engagement de l’employé valorisé. La question de l’augmentation de salaire reste dissociée des rencontres, afin de ne pas compromettre leur nature pleinement coopérative.
« On n’aborde aucune chose négativement. L’accent n’est plus mis sur ce qui ne va pas, sur des côtes de notation dépréciatives, stériles et vexantes », explique Philippe Zinser, selon qui les rencontres de collaboration facilitent au contraire un échange productif d’informations et laissent parfois surgir des idées profitables pour l’entreprise.
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