Les visages de la cyberintimidation au travail

Les jeunes ne sont pas les seuls à être victimes de mots blessants sur les réseaux sociaux. Les employés subissent eux aussi cette violence virtuelle, mais bien réelle. Une réalité émergente avec laquelle les gestionnaires doivent apprendre à négocier.

Moqueries, insultes, dénigrement, propos diffamatoires ou haineux… L’intimidation sur le lieu de travail n’est pas un phénomène nouveau, mais la généralisation de l’usage des réseaux sociaux a déplacé la violence verbale des corridors vers Facebook. Avec, à la clé, un impact qui est souvent plus lourd pour la personne visée. « Sur Internet, les messages restent, le public est infini et l’absence de face-à-face réduit l’empathie de l’auteur pour la victime, souligne Marthe Saint-Laurent, conférencière et auteure sur l’intimidation. Au final, les propos sont souvent plus virulents. »

Autre particularité des commentaires publiés sur internet : l’écrit laisse plus de place à l’interprétation que la parole orale. « Une blague peut être ainsi mal perçue », ajoute Mme Saint-Laurent.

 

L’employeur, toujours concerné

La cyberintimidation est parfois perpétrée à l’extérieur du bureau, depuis l’ordinateur personnel d’un travailleur par exemple, mais elle oblige quand même les gestionnaires à agir. La loi sur le harcèlement psychologique impose à l’employeur d’intervenir sous peine de pouvoir être poursuivi par le salarié qu’il n’a pas su protéger.

Mais ce qui se passe sur Facebook se répercute également sur toute l’équipe. Ces méfaits peuvent finir par empoisonner tout le climat de travail. « Il y a un risque de surenchère si rien n’est fait pour l’arrêter, mais aussi de confrontation entre la victime et l’auteur et de formation de clans », avertit Ghislaine Labelle, CHRA et psychologue organisationnelle au sein du Groupe Conseil SCO.

 

De la pédagogie

Les gestionnaires peuvent prévenir ces mauvais comportements en commençant par faire de la sensibilisation. « Le fait que ce soit virtuel et donc non concret donne aux gens l’impression que leurs messages sur Facebook n’ont pas de conséquences », explique Katherine Poirier, CRHA et associée du cabinet Borden Ladner Gervais. 

Former son personnel et établir une politique sur le non-usage des médias sociaux qui renvoie à celle sur le harcèlement et la discrimination est essentiel. «  Il faut que cette politique soit accessible, simple à comprendre et régulièrement amendée pour bien épouser la réalité de l’organisation », indique la spécialiste en droit du travail et de l’emploi.

 

Ne pas laisser la situation dégénérer

Quand des faits de cyberintimidation sont rapportés au gestionnaire, celui-ci a tout intérêt à intervenir tôt en rencontrant l’auteur des messages blessants pour en exiger le retrait. « Ces personnes ont souvent un comportement manipulateur er risquent de nier ou de faire valoir leur liberté d’expression, informe Mme Labelle. Attention donc à bien se préparer en rassemblant les preuves écrites, en s’appuyant sur la politique contre le harcèlement de l’organisation et en prévoyant un message clair à faire passer. »

La réaction du gestionnaire doit également dépendre du dossier de l’employé coupable et du contexte entourant les actes de cyberintimidation. « S’est-il montré coopératif en acceptant de retirer tout de suite les messages ou pas? A-t-il avoué ou est-il dans le déni? La motivation initiale était-elle de vouloir se venger ou de faire une blague? interroge Katherine Poirier. La punition doit être graduelle, allant de l’avertissement au congédiement en passant par la suspension. » Une médiation entre le travailleur fautif et la victime est parfois également souhaitable, surtout si l’intégrité psychologique du salarié visé est très atteinte. 

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