Le monde à l’envers
Le web 2.0 amène de profonds changements dans la façon dont les organisations évaluent leur performance RH. L’approche « Top Down » traditionnelle est en train de faire place au « Bottom up ». Il n’y a pas si longtemps encore, les conseils d'administration pratiquaient le « Rubber stamping » sur les projets stratégiques et ne se préoccupaient guère que du cours de l’action pour satisfaire les actionnaires. Bien que cela soit encore vrai dans bien des cas, il semble que le climat de travail, le roulement de personnel et le bonheur des employés fassent maintenant partie des préoccupations des conseils. On commande des sondages et des études, et on se livre bataille désormais pour devenir le « meilleur employeur ». L’objectif de se qualifier comme employeur de choix a donc finalement percé le plafond de verre.
L'entreprise, pour être performante dans l'économie du savoir, a désormais besoin d'employés heureux. Les employés heureux participent quatre fois plus à la création de valeur pour l’entreprise. L’enjeu est donc de taille. Le problème est qu’il est très difficile, lorsque l'on est en haut de l’échelle, de savoir comment se sentent ceux qui sont en bas. Croire qu'il suffit de le demander pour le savoir est utopique, toute vérité n’étant pas bonne à dire lorsque son emploi est en jeu. On obtient donc généralement une version édulcorée de la réalité. Quand on sait que 81 % des employés aiment ou adorent leur patron (voir le dernier sondage de Towers Perrin), il y a de quoi s'interroger sur la méthodologie de collecte de l'information…
Le web 2.0 amène une nouvelle dimension à ces études et sondages initiés par l'entreprise elle-même. Le site RateMyEmployer.ca est le premier du genre au Canada. Avec RateMyEmployer.ca, ce n’est plus l’entreprise qui interroge l’employé, mais l’employé qui, spontanément et sous le couvert de l'anonymat, note et évalue son employeur. L'entreprise n'est plus l'initiatrice de la démarche d'évaluation, si bien que les moins bons employeurs se retrouvent aussi à concourir bien malgré eux. Si certains tremblent à l'idée de devoir laver leur linge sale sur la place publique, d’autres y voient une occasion unique de recueillir des informations impossibles à obtenir autrement que sous le couvert de l'anonymat.
Certes, l'information est brute et l'anonymat engendre parfois chez certains quelques dérapages. Il faut aussi garder à l'esprit que les mécontents ont plus facilement tendance à s'exprimer que les satisfaits. Il n'en demeure pas moins que cette nouvelle façon pour les employés de faire entendre leur voix sans risque de représailles connaît un réel engouement et génère une quantité impressionnante d'informations, d'opinions et d'analyses provenant de toutes les strates de l'entreprise. Comme l'important n'est plus ce que dit l'entreprise mais bien ce qui se dit sur l'entreprise, ne devient pas meilleur employeur qui veut.
Si c’est le monde à l’envers pour certains, les entreprises qui sauront composer avec cette nouvelle transparence forcée se placeront certainement parmi les meilleurs employeurs.