Valoriser les compétences des immigrants

Au Canada, seuls 40 % des travailleurs qualifiés issus de l’immigration exercent dans le domaine pour lequel ils ont été formés. Pourquoi ? Parce que les entreprises canadiennes peinent à reconnaître leurs compétences. Lorsqu’il s’agit de combler des postes clés, les recruteurs s’orientent en effet vers des travailleurs canadiens… Un phénomène naturel mais dommageable selon Linda Manning, de l’université d’Ottawa.

Entre 2001 et 2006, plus d’1,1 million d’immigrants se sont établis au Canada selon Statistique Canada et 51 % d’entre eux ont un diplôme universitaire, contre 20 % pour les canadiens. Pourtant, à compétence égale, il leur faudra dix ans avant d’atteindre un niveau d’emploi comparable à celui des canadiens d’origine.

« Concrètement, les employeurs cherchant à remplacer les baby-boomers qui partent à la retraite ont pour réflexe de former des jeunes cadres canadiens, dont ils connaissent bien les diplômes », explique Linda Manning, directrice du programme de recherche « Faire valoir les talents des immigrants en vue de renforcer les entreprises canadiennes ». Les lourdeurs administratives ne jouent pas non plus en faveur d’une plus grande diversité des recrutements. Résultat : les travailleurs immigrants, pourtant compétents et expérimentés, restent à des postes subalternes, sans avoir la chance d’être promus ou même formés.

Manque d’ouverture

« Avez-vous déjà fait preuve de leadership dans un camp de boyscout ? Voilà la question que s’est vue posée une travailleuse immigrante en entretien de recrutement, illustre Linda Manning. Bien sûr, la candidate n’avait pas la moindre idée de ce qu’était le scoutisme, mais cela ne l’empêchait pas d’être une excellente gestionnaire… » Les techniques de recrutement ne seraient donc pas adaptées au changement démographique que vit le Canada.

Il ne s’agit pourtant pas de promouvoir particulièrement les immigrants, mais tout simplement de s’ouvrir suffisamment pour trouver le meilleur profil sans préjugé, quelque soit le pays où il a été formé et travaillé auparavant… « Nous ne cherchons pas à pointer du doigt les professionnels des RH, notre objectif est de les aider à développer de nouvelles stratégies de recrutement afin qu’ils puissent mieux tirer parti des compétences de la population immigrante hautement qualifiée. »

Tester ses méthodes

Linda Manning et son équipe travaillent sur des outils pour aider les recruteurs à réorienter leurs pratiques de recrutement et s’ouvrir ainsi à tous les talents disponibles. Les chercheurs ont notamment mis au point un jeu de mise en situation interactif permettant aux recruteurs de se tester pour repérer leurs mauvaises habitudes de gestion et de sélection. Objectif, prendre conscience des changements à mettre en œuvre pour élargir leurs pratiques. Le jeu sera officiellement lancé le 2 octobre 2009 et disponible en ligne sur le site www.diversiteleadership.uottawa.ca

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