Plus que de simples considérations, les thèmes de l’écologie et du développement durable doivent susciter l’action au sein des entreprises. Et, en marge des remises en question fondamentales concernant le fonctionnement tout entier des compagnies, quelques efforts peuvent, à court terme déjà, porter leurs fruits.
L’éco-responsabilité : valeur ajoutée pour l’entreprise
Payant, le tournant vert au sein des entreprises ? « Sans nul doute », répond Pascoal Gomes, conseiller en communication au Centre d’écologie urbaine de Montréal, qui œuvre auprès des organismes et collectivités pour mettre en place des actions éco-responsables. « D’abord parce qu’intégrer des réflexes écologiques amène à réviser les méthodes de travail, et peut conduire à plus de performance et de compétitivité. Ensuite, parce que cela peut aussi devenir un argument fort pour intéresser les salariés à venir rejoindre les rangs de la compagnie. L’écologie fait donc figure de stratégie corporative efficace ».
Les patrons canadiens sensibles à l’écologie
Des atouts que les chefs d’entreprise canadiens semblent dores et déjà avoir bien compris : selon une étude PricewaterhouseCoopers (PwC), les instances décisionnaires des entreprises du pays, toutes provinces confondues, étaient dès 2010 les plus engagées à l’échelle mondiale. Mieux : 93 % d’entres elles prévoyaient alors de modifier sans attendre leurs stratégies en matière de développement durable et de responsabilité sociétale.
Une prise de conscience qui s’explique notamment par la volonté des pouvoirs publics à encourager les comportements verts au sein des entreprises, comme le confirme Pierre Taillefer, associé au sein des Services de consultation de PwC à Montréal : « La réglementation environnementale plus stricte a fait des changements climatiques une priorité de plus en plus grande pour les dirigeants d’entreprises. »
Parmi les mesures prescriptrices, le gouvernement fédéral a notamment rendu plus exigeants, depuis la fin de l’année 2010, les seuils de déclaration des gaz à effets de serre causés par l’activité des sociétés canadiennes. A l’échelle provinciale aussi, la Colombie-Britannique, le Manitoba, l’Ontario ou encore le Québec ont chacun souscrit à la WCI (Western Climate Initiative), qui s’attache, en Amérique du nord, à encadrer la réduction des conséquences néfastes de l’activité et de la production des entreprises à travers l’ensemble des provinces et états signataires.
Place à l’action !
Si, à l’heure du changement et du grand virage vers l’écologie, les entreprises du secteur industriel ont fort à faire pour améliorer les potentiels effets néfastes de leur production sur l’environnement, les compagnies de la filière tertiaire ont elles aussi de nombreux leviers d’actions efficaces à leur portée.
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De l’utilité du diagnostic
Le processus d’éco-responsabilisation de l’entreprise commence par un diagnostic complet des pratiques actuelles. « Après la prise de décision vient le temps d’un audit global, qui seul pourra distinguer les efforts précis qu’il reste à fournir pour que l’entreprise atteigne les objectifs qu’elle s’est fixée », souligne Pascoal Gomes. Surconsommation énergétique, transports trop polluants, politique d’achat peu éco-responsable… Une fois les grands postes de gaspillage identifiés, place à l’instauration de pratiques nouvelles.
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Agir sur les trois« R »
Réduire, recycler, repenser : trois verbes en « R » pour cinq axes d’actions concrètes, qui, des différents services de l’entreprise à la salle de repos, en passant par la cuisine ouverte aux salariés et les activités extérieures, rassemblent autant de moyens simples à mettre en œuvre, dont voici quelques exemples.
Première des stratégies : réduire la consommation d’énergie, qui représente, pour toutes les entreprises, un poste de dépense conséquent. Baisser le thermostat du chauffage l’hiver et la climatisation pendant les beaux jours est un premier pas. Diminuer ou augmenter d’un degré la température ambiante dans les locaux de l’entreprise représente un allègement de 10 % en moyenne de la facture annuelle.
Il est même possible d’aller jusqu’à dégager des bénéfices en s’intéressant de plus près à la question des énergies alternatives et renouvelables. « Je pense notamment à l’exemple d’une société montréalaise qui, en installant un mur solaire sur ses locaux, a pu opéré un retour sur investissement en deux ans, et dégage maintenant des bénéfices nets directement permis par cette source d’énergie propre », décrit Pascoal Gomes.
Autres moyens de réduire la note énergétique de l’entreprise : systématiser la mise hors tension des appareils électroniques (ordinateurs, imprimantes…) ; installer des minuteurs aux éclairages situés dans les sanitaires, par exemple, où les lampes restent souvent allumées ; miser davantage sur la lumière naturelle, en abaissant les stores à chaque fenêtre, et en choisissant des couleurs claires pour les revêtements muraux ; préférer, aux robinets traditionnels, des boutons poussoirs, qui permettent une réduction de la consommation d’eau de près de 50 %… Des réflexes simples, qui, appliqués par tous, peuvent déjà changer la donne.
Très gourmandes en papier et autres fournitures de bureaux, les entreprises peuvent également, par quelques mesures faciles, maîtriser au mieux les stocks laissés disponibles à leurs employés. Le mot d’ordre cette fois : recycler, ou miser tout au moins sur une réutilisation optimisée des ressources disponibles. Les stylos classiques, vite vidés et souvent égarés, peuvent par exemple être remplacés par des stylos rechargeables. Une astuce économe, à condition d’une sensibilisation menée auprès de chaque employé.
Autre bonne idée : la réutilisation des rames de papiers. Imprimées seulement au recto, les versos des feuilles peuvent constituer un approvisionnement conséquent de brouillons, et même, à l’aide d’une pince à dessin, se transformer en un utile bloc note. Un effort moindre, qui peut venir renforcer une politique attentive de l’utilisation du papier dans l’entreprise : paramétrage des imprimantes qui, par défaut, n’éditent qu’un exemplaire du document envoyé, ou encore préférence affirmée pour l’utilisation des supports numériques.
Repenser les trajets entre le domicile et le travail des salariés et les déplacements professionnels, réorienter la politique générale d’achat… Les entreprises ont le champ libre pour revoir tout ou partie de leurs modes de fonctionnement établis aujourd’hui.
Sur le sujet de la mobilité notamment, de nombreuses actions sont possibles à court terme. Parmi elles : l’instauration de supports à vélos supplémentaires dans les zones de stationnement, qui peuvent suffire à inciter les employés à faire l’usage de leur bicyclette ; la mise en place d’un système de covoiturage entre les collaborateurs de l’entreprise ; ou encore la négociation auprès d’un service urbain d’auto-partage, pour couvrir les besoins ponctuels de véhicule à usage professionnel.
Préférence pour les produits recyclés ou éco-responsables, choix d’approvisionnement auprès de fournisseurs locaux, mais aussi prédilection pour un café issu du marché équitable… A toute échelle, de la boisson dégustée à l’heure de la pause aux matières nécessaires à la production et l’activité de l’entreprise, la politique des achats a, enfin, un rôle majeur à jouer pour entreprendre le tournant vert qui s’impose aux compagnies comme à la société toute entière.